Nunca más

Clarisse Piot explore dans son travail photographique la possible construction d’une mémoire collective des lieux. Que faire de la mémoire d‘un territoire, comment interpréter les traces visibles qui subsistent, ou au contraire leur absence ? Nunca Más, œuvre dont le titre reprend le nom du rapport de la Commission Nationale d’Argentine publié en 1984, retrace la disparition de trente mille opposants politiques enlevés par les militaires argentins pendant la dictature d’État (1976 - 1983). Les actions violentes effectuées ont été effacées par la volonté du pouvoir de ne pas laisser de traces. L’artiste, qui s’est déplacée dans l’optique de récolter, puis restituer les vestiges restants de ces disparitions, n’a trouvé sur place que des lieux ordinaires, qui ne se prêtent à aucune monumentalisation de la mémoire. L’histoire pourrait avoir été oubliée. Sur le verre, symbole de la fragilité des corps comme de la mémoire, sont inscrites des données factuelles (noms, dates de disparition des opposant.es et lieux) créant une tension entre l’image et le texte. Une caisse de transport vient compléter le dispositif. On y retrouve des informations récoltées sur les disparitions qui correspondent aux images sans plaques de verre. La superposition, qui entremêle noms, dates et lieux, rend l’information tout comme la compréhension de l’histoire difficilement assimilable.

Texte d’Agnès Violeau, Commissaire d’exposition dans le cadre de  Fais-moi une place, exposition collective, Arles, 2023.